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Pietr le Letton: un “cliché très ferroviaire” *

(* l’expression est empruntée à Michel Carly)

Ce roman, le premier de la série “officielle” à avoir été écrit, n’est cependant que le cinquième à paraître en librairie, en mai 1931. Pourquoi ce délai ? Parce qu’il n’avait pas assez convaincu Fayard, qui a préféré lancer en “ballon d’essai” deux autres romans ? Par simple “hasard”, comme le prétend Simenon dans la préface qui inaugure l’édition Rencontre ? Est-ce le succès du Charretier de la Providence, et plus encore du Chien jaune, qui a enfin persuadé Fayard de ressortir de ses tiroirs ce roman qu’il avait d’abord dédaigné ? Quoi qu’il en soit, la couverture de l’édition originale était une réussite: un train arrêté, une foule penchée sur un corps étendu qu’on devine, meurtre et mystère… L’illustration est reprise telle quelle pour deux traductions.

Le motif est réutilisé sous forme de dessin dans deux rééditions.

Le thème du train va être repris dans de nombreuses éditions, et on verra sur les couvertures des wagons, des trains, des rails et des gares.

D’autres illustrations utilisent le thème ferroviaire, mais en plan plus rapproché, comme cette édition japonaise qui expose le cadavre dans le lavabo, une édition danoise qui montre la porte de ce lavabo, et une édition néerlandaise qui illustre joliment le thème du voyage, avec une pipe munie d’une étiquette de valise.

Certains illustrateurs ont préféré choisir d’autres décors pour imager le roman, comme le luxe de l’hôtel où descend le Letton.

Le choix peut aussi porter sur une scène dramatique, comme la poursuite sur les quais de Fécamp, ou le suicide de Pietr.

D’autres illustrations proposent la mise en scène d’un personnage du roman: Pietr en Fédor Yourovitch, Anna Gorskine, ou les Mortimer-Levingston.

Enfin, le choix peut porter sur un objet représentatif de l’intrigue: une bouteille symbole de l’ivresse de Pietr, la photo de Mme Swann, ou le poêle à charbon qu’on trouve à l’incipit du roman.

La Nuit du carrefour: la femme, la route et la voiture

Ce roman est publié en juin 1931. Le titre semble appeler de lui-même son illustration: un croisement de routes, dans un paysage nocturne. La couverture de l’édition originale montre bien une route, mais sur son revers. Le devant de la couverture présente une femme à sa fenêtre (s’agit-il d’Else ?) qui semble observer ce qui se passe à l’extérieur. La même couverture est utilisée pour la première édition norvégienne. On retrouve un visage de femme, et des éléments repris du dos de la couverture, pour la première réédition de 1936 chez Fayard.

L’image du carrefour, ou du moins de la route, va être reprise dans plusieurs éditions.

De la route, on passe, nécessairement, à la voiture. Les couvertures nous montrent une voiture, parfois avec un arrière-plan de route, puis, dans une mise en scène plus dramatique, le cadavre de Goldberg dans la voiture d’Andersen.

Dans d’autres illustrations, le choix est de présenter un des lieux de l’enquête, comme le garage d’Oscar ou la maison des trois veuves.

Le plan peut encore se rapprocher, et on découvre alors l’intérieur du garage, comme dans une édition espagnole, voire même un objet qui le symbolise, les pneus comme dans cette édition grecque, ou comme l’illustre joliment l’édition catalane. L’édition récente du Livre de Poche et une édition allemande proposent l’image de pompes à essence, qui évoquent aussi le garage d’Oscar.

Une autre façon d’illustrer la couverture est de montrer l’un des personnages: Mme Goldberg lors de son assassinat, Else, ou Karl Andersen. On notera la finesse de l’illustrateur de l’édition norvégienne, qui nous présente la scène où Else tente d’échapper à la surveillance de Maigret.

Enfin, un autre choix encore est celui de présenter un objet typique de l’intrigue, comme les bijoux à l’origine du crime.